TAIINNN ! Je rate un débat sur les scènes d'amour de BR !
Très personnellement je suis un peu comme [mention]Pile-Poil[/mention] , j'ai toujours vu la scène d'amour entre Rachel et Deckard comme une scène d'amour bestiale.
Tout petit encore, quand j'ai vu le film pour la première fois, je trouvais effectivement que ça ressemblait à un viol. Mais qui conclue une scène où la tension sexuelle est particulièrement high level.
Rachel, qui change sa coiffure et enlève son manteau pour jouer au piano. Elle attire Deckard jusqu'à elle sur le siège de pianiste. Elle accepte le compliment de Deckard qui lui dit qu'elle joue bien.
PUIS, Deckard qui essaie de l'embrasser, elle s'eclipse.
Je trouve cette scène trés humaine... car Rachel agit comme un animal qui séduit avant d'adopter un comportement farouche.
Donc du coup Deckard fait comme un animal mais avec cette volonté aussi à faire accepter à Rachel sa condition d'être humain. En mode "tu te crois robot parce que tu as appris une vérité sur toi... mais tout tes comportements empathiques montrent que non, tu es aussi humaine que moi."
Et du coup j'ai toujours vu la scène comme une scène plutôt violente psychologiquement pour Rachel : Deckard la met dos au mur (au sens propre comme au figuré) sur sa condition pour la forcer à rester l'humaine qu'elle pensait être depuis tout le reste de sa vie.
Et Deckard m'est toujours apparu comme un homme pour qui la nature de Rachel n'a aucune importance : d'ailleurs, il essaie de la draguer au téléphone dans une scène précédente (quand il traque la femme au serpent), ce à quoi elle le rembarre. Deckard la traite... comme si c'était une femme en réalité (puisqu'il fait l'effort de l'appeler, de la séduire, de la complimenter, de la consoler quand elle apprend la nouvelle sur sa nature de Répliquant).
C'est en ça que la scène d'amour est trés impressionnante : elle est complètement ambivalente car totalement amorale.
C'est montré comme un acte violent qui se transforme en amour parce que les deux protagoniste se sentent un coup humain, un coup robot, hésite à passer à l'acte... et Deckard en fermant la porte violemment et en plaquant Rachel contre le mur et en lui ordonnant de répéter ses paroles, il "tranche le nœud gordien" dans lequel Rachel est incapable de se dépêtrer.
La scène d'amour de 2049 est extraordinaire également, car en fait, elle reprend la même idée mais différemment.
Le concept de l'IA qui veut satisfaire son compagnon (répliquant) en utilisant le corps d'une prostituée (elle-même répliquante) pour s'y superposer... c'est donner au sexe une valeur illusoire pour se sentir humain.
Dans BR, la scène de sexe donnaient à Deckard et Rachel l'opportunité de se définir comme humains.
Dans BR 2049 je vois la scène de sexe comme une simulation. Joi et Joe sont dans une phase où l'un des deux commence à développer une incertitude sur sa nature... et Joi veut tenter de faire comme Deckard vis à vis de Rachel, elle veut faire accepter à Joe que leur couple n'est pas une illusion... EN UTILISANT UNE ILLUSION (je trouve le concept énorme, personnellement). Un peu comme si multiplier MOINS par MOINS donnerai un PLUS... bizarre... mais un PLUS qu'en même.
Trés personnellement, je trouve la scène de 2049 hallucinante car d'un point de vu cérébral, elle est trés... trés... TREESSS bizarre... MAIS en m'identifiant à Joe ou à Joi... j'arrive à comprendre la démarche étant donné l'environnement dans lequel les personnages vivent où illusion et factice sont devenus des denrées sur laquelle les gens fondent leur bonheur.
VOILA A QUOI EN SOMMES NOUS REDUITS pour rêver coucher avec la femme idéale.
A ce sujet, je trouve que la scène d'amour décrite par Philippe K. Dick dans
Les androïdes rêvent-ils de moutons électriques ? est un entre 2 de ces deux scènes... mais pour un résultat complètement inverse.
Rachel est vraiment dans l'optique de séduire et coucher avec Deckard.
Ils couchent ensemble, mais ce n'est pas Rachel qui subit l'ultimatum existentiel sur sa nature, mais Deckard : car il se rend compte qu'il a été capable de ressentir des pulsions sexuelles bien humaines pour un robot, et il ne se sent finalement plus capable d'exercer son métier de tueur de robot car en couchant avec Rachel et en éprouvant une même passion pour elle que pour sa femme (dans le bouquin, Deckard est marié) il ne se sent plus capable de différencier moralement les deux idividus (humain et robots).
En fait, dans le bouquin, la scène d'amour est un acte dans lequel Rachel GAGNE sur Deckard car elle bousille complètement ses certitudes sur leur nature robotique.
En fait, je ne saurais pas dire quelle scène m'a le plus marqué, car les 3 sont assez hallucinantes en terme d'ultimatum existentiel.
Mais c'est représentatif de cet univers Cyberpunk où la nature humaine est devenue tellement complexe que les individus sont de plus en plus incertains sur eux-même. Et montrer le sexe comme un élément qui les fixe sur des certitudes (dans le cas de Ridley Scott et Denis Villeneuve) ou des incertitudes (Philippe K.Dick)... je trouve ça super intéressant, au-delà de la question "Est-ce un viol ou non ?"