@B-Lyndon Je ne sais pas si tu fais partie de ses contacts sur les réseaux sociaux, mais au cas où tu aurais manqué ce post, voici un très beau texte qu’un cinéphile a consacré à Trás-os-Montes (1976 - Margarida Cordeiro et António Reis)
La vie quotidienne dans un petit village rural au Portugal. “Trás-os-Montes” est considéré comme un des films majeurs du cinéma portugais mais il est malheureusement resté quasiment invisible en France depuis sa sortie en 1978. Les copies qui circulaient à droite ou à gauche ne lui rendaient vraiment pas justice et ne permettaient pas de se faire un avis par soi-même, jusqu’à ce qu’une version restaurée diffusée sur la chaîne RTP et enregistrée par un bon samaritain le permette enfin (même si on est loin de la qualité d’un blu-ray et que c’est à 25fps). Une autre raison pour laquelle ce film est à la fois si célèbre et si peu vu est sa grande austérité. Un film si âpre et qui tente si peu de séduire le spectateur est rare et on peut dire qu’il se mérite.
Contrairement aux films de Straub-Huillet, il ne tient pas par sa forme et son style (il y a beaucoup de zooms, certains plans fixes très longs mais ce n’est ni une règle ni un principe, pas de soin particulier accordé au cadre même si tout semble naturellement harmonieux et que c'est le grand Acácio de Almeida à la caméra). Tourné en 16mm et uniquement avec des habitants du village, on peut forcément faire un lien avec le néo-réalisme mais on est très loin du naturalisme et le couple Cordeiro-Reis qui a réalisé trois courts avant ce premier long-métrage puis réalisera seulement deux longs ensuite (les trois longs formant une trilogie) a simplement inventé son propre style, inimitable. La force de ce film vient de sa pauvreté, de sa simplicité, de son dénuement, de son côté brut, presque baroque, mais il nous laisse un peu sur notre faim car le pari était difficile de marier réalisme rural et onirisme, quotidienneté et mythe tout en oscillant entre fiction, document ethnologique et veine expérimentale. De célèbres cinéastes portugais ayant vu ce film transformeront l’essai, chacun à sa façon: “Veredas” de Monteiro en 1978 et “O rio do ouro” de Rocha en 1998, la voie ayant déjà été ouverte par Oliveira (qui d’autre?) avec “Acto de primavera” en 1964.
De “Trás-os-Montes” on retiendra la sauvage et incorruptible beauté.
ps: Perso, je n'ai pas vu le film mais "Acto de primavera" est, selon moi, "La pointe courte" du cinéma portugais. C'est dire !!

"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub