Le Centre de Visionnage : Films et débats

Discutez de vos récentes expériences cinématographiques et complétez vos Tops annuels !
Avatar du membre
B-Lyndon
Messages : 615
Enregistré le : sam. 10 oct. 2020 09:31

groil_groil a écrit :
lun. 16 janv. 2023 14:16

Image

Je vais terminer une rétrospective intégrale entamée l'an dernier, consacrée à Nuri Bilge Ceylan. Il me restait 3 films à revoir : Koza, Kasaba et Nuages de Mai, et un à découvrir, sa Palme d'Or Winter Sleep, que j'avais snobé notamment à cause de sa durée (3h16) mais surtout par les retours négatifs que j'en avais eu (long pensum, archétype du film de festival, metteur en scène trop sûr de lui, pour aller vite). Bref, je n'y allais pas à reculons, car j'adore le cinéaste, mais je n'en avais pas une envie folle non plus... Et bien contre toute attente, grosse déculottée, j'ai littéralement adoré ! Grande classe, le film est sublime, sublimement mis en scène, et à la fois Ceylan ne radote pas du tout, mais surtout je crois que jamais il n'est allé aussi loin dans le traitement de la relation de couple dans son oeuvre (encore plus loin que dans Les Climats), et tout ça en mettant en relation crise de couple et éléments naturels, c'est fait avec une beauté et une force saisissante. En cela il me fait un peu penser au dernier Reygadas (deux cinéastes qui ont pas mal de choses en commun d'ailleurs, même si l'approche est très différente). C'est dingue ça, je pensais détester et le film m'a renversé !

Ca me donne envie de le voir, j'ai toujours eu un peu peur de ce film. Tu as vu Le Poirier Sauvage ? Une merveille. :love2:
« j’aurais voulu t’offrir cent mille cigarettes blondes, douze robes des grands couturiers, l’appartement de la rue de Seine, une automobile, la petite maison de la forêt de Compiègne, celle de Belle-Isle et un petit bouquet à quatre sous »
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

B-Lyndon a écrit :
mar. 17 janv. 2023 09:33
groil_groil a écrit :
lun. 16 janv. 2023 14:16

Image

Je vais terminer une rétrospective intégrale entamée l'an dernier, consacrée à Nuri Bilge Ceylan. Il me restait 3 films à revoir : Koza, Kasaba et Nuages de Mai, et un à découvrir, sa Palme d'Or Winter Sleep, que j'avais snobé notamment à cause de sa durée (3h16) mais surtout par les retours négatifs que j'en avais eu (long pensum, archétype du film de festival, metteur en scène trop sûr de lui, pour aller vite). Bref, je n'y allais pas à reculons, car j'adore le cinéaste, mais je n'en avais pas une envie folle non plus... Et bien contre toute attente, grosse déculottée, j'ai littéralement adoré ! Grande classe, le film est sublime, sublimement mis en scène, et à la fois Ceylan ne radote pas du tout, mais surtout je crois que jamais il n'est allé aussi loin dans le traitement de la relation de couple dans son oeuvre (encore plus loin que dans Les Climats), et tout ça en mettant en relation crise de couple et éléments naturels, c'est fait avec une beauté et une force saisissante. En cela il me fait un peu penser au dernier Reygadas (deux cinéastes qui ont pas mal de choses en commun d'ailleurs, même si l'approche est très différente). C'est dingue ça, je pensais détester et le film m'a renversé !

Ca me donne envie de le voir, j'ai toujours eu un peu peur de ce film. Tu as vu Le Poirier Sauvage ? Une merveille. :love2:
Oui j'adore aussi, si tu aimes le Poirier tu aimeras celui-ci (j'en avais peur aussi ;) )
I like your hair.
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

Image

Haut, bas, fragile, Jacques RIvette, 1995[/b

Chez Rivette on ne fait rien comme tout le monde. Le cinéaste a une vision de la vie qui n'appartient qu'à lui.
Cette vision, il la distribue (comme les cartes d'un jeu plus vaste) entre trois personnages principaux. Trois femmes : Marianne Denicourt, Nathalie Richard, Laurence Côte.
Denicourt semble sortie d'un conte de fée, en fait elle émerge seulement d'une très longue absence (un coma de cinq ans). Elle est celle qui a tout mais ne sait rien, et se trouve prise de vertige face à une représentation de Paris par des temps plus anciens. Le passé est un gouffre face auquel elle se dérobe. Pendant son coma, elle a hérité d'une grande maison dans Paris, mais elle préfère vivre à l'hôtel, "en transition", comme une personne qui ne serait pas d'ici, alors que tout l'y attache avec force.
Laurence Côte est l'adoptée qui n'a jamais connu sa première mère. Derrière elle il n'y a rien de précis, et donc possiblement tout. Elle se laisse obséder par une chanson dont elle cherche les paroles, qu'elle pense avoir entendue bien avant d'être née. Elle travaille à la bibliothèque, trie de grands livres épais et lourds dont l'ancienneté la nargue, elle qui vient tout juste d'arriver à Paris, et qui parle à son chat à défaut de s'intéresser à l'amitié ou à l'amour. Elle poursuit sa quête, ce mystère qui la lie à tous les inconnus et la sépare de tous en même temps, et pourtant ne supporte pas qu'on la reconnaisse.
Nathalie Richard est encore d'un autre genre. Elle circule dans Paris (à mobylette ou en rollers) pour livrer des colis énormes et des fleurs, elle vole, danse, joue plusieurs rôles, embrasse à l'impromptu, réclame son dû, restitue la connaissance (et non les biens). Si libre et si indépendante qu'on pourrait la croire amorale. C'est d'ailleurs sa seule inquiétude : qu'on la juge. Mercurienne, elle se lance dans la ville pour rétablir les liens entre les gens, les mondes et les époques.
Le film est très chorégraphié, parfois chanté. On y voit des personnes tourner sur elles-mêmes, monter, descendre, répondre à la musique comme si elles étaient hypnotisées, jouer et obéir à toutes les règles, même les plus dangereuses, entrer dans des maisons, suivre, poursuivre, se défiler, détruire les vieux papiers. Les hommes sont embrassés, cueillis, surpris, très tourmentés. Les femmes mènent la danse. Mais toujours dans l'ombre d'un père (comme souvent chez Rivette), duquel il faut apprendre à se défaire, quitte à déchoir. Todeschini est peut-être un ange pour Denicourt, mais c'est son père qui l'envoie à ses trousses. Alors comment savoir ce qu'est l'amour ? Le père n'est qu'une voix sur un téléphone, mais tout de même il est là, partout, caché au fond d'un meuble, présent à chaque seconde de sa vie sans qu'elle s'en aperçoive. Il lui faudra beaucoup lutter, et affronter ses peurs pour s'en séparer pour de bon.
Le film circule sans cesse entre ce qui est haut et ce qui est bas : les classes sociales, les sous-sols, les étages, les toits. La vie pour Rivette est ainsi : entre la matière et l'esprit. C'est là, dans cette tension, que se situe toute la fragilité des êtres. Et c'est ce qui les conduit à chanter et danser. Drôle de chemin pour ce cinéaste, qui réalise soudain, à 70 ans, une comédie musicale.]
Avatar du membre
cyborg
Messages : 285
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:11

Image

Sous le signe du vaudou - Pascal Abikanlou - 1976

Film fondateur du cinéma béninois, Sous le signe du Vaudou est un film extrêmement simple dans sa narration : un jeune villageois décide de partir vivre en ville pour aider sa famille à subvenir à ses besoins. Après quelques tentatives infructueuses il finit par retourner auprès des siens.
La destinée d'un seul individu pour incarner le portrait de tout un pays déchiré entre modernité et des traditions religieuses, culturelles, familiales encore très puissantes. Si le film est assez fragile cinématographiquement, tout son intérêt repose sur sa dimension ethnographique et ses images rares de la campagne du Bénin.


Image

Eami - Paz Ancina

Ancina prolonge sa mue cinématographique débuté dès son deuxième film "Excercice de mémoire" dans lequel elle adoptait un style flottant et aérien dénotant radicalement avec la fixité des longs plans de Hamaca Paraguya. Elle superposait alors à ses images de territoires anciennement en conflit les voix de témoignages d'opprimés de la dictature d'Alfredo Stroessner. Dans Eami elle s'intéresse aux populations amérindiennes ayant souffert de la colonisation occidentale, notamment durant la guerre du Chaco dans la deuxième et troisième décennie du XXème siècle.
Si le cinéma n'est plus le même, la toile de fond reste similaire : la guerre du Chaco. Le couple de paysan d'Hamaca attendait en effet son fils parti sur le front et dont le retour tardif ne manquait pas de générer de nombreux tourments. Nous ne connaissions rien de ce vieux couple mais nous pourrions tout à fait les imaginer en hors-champs de Eami, s'attaquant aux populations natives présent sur leur exploitation. Tout ceci n'est bien entendu que pure spéculation de ma part mais afin de souligner de quelle manière Ancina à retourné sa façon d'aborder le territoire qu'elle filme et l'histoire de son pays, ce qui l'a en retour conduit à faire évoluer sa forme cinématographique. De plus si les bruits de la campagne faisait pencher Hamaca du coté du film "sensoriel" , cet aspect est ici totalement incarné par sa mise en scène et son esthétique qui se veut au plus près des croyances traditionnelles des natifs.
Si je suis moins réceptif émotionnellement et artistiquement à ce film qu'à Hamaca, je ne peux m'empêcher de le trouver intéressant et aux intentions plus que louables.


Image

Illustration parfaite de l'expression "allumer une bougie au lance-flamme".
Que nous adapterons aux circonstances thématiques du film : "remplir une tasse à café à la lance à incendie".
Merci quand même James, on t'aimait bien.



Image

En 1902, les derniers jours d'une famille afro-américaine avant leurs migration vers le nord des Etats-Unis. De vives discussions, entre désaccords, tendresses et souvenirs, émergent entre les 3 générations réunies, et notamment 3 femmes occupant le cœur du film.
Daughter of the Dust, paru en 1991, fut le premier film réalisée par une femme noire à bénéficier d'une large sortie commerciale aux USA. C'est peut-être cette ambition "commerciale" du film qui, à mes yeux, l’empêche d'être artistiquement satisfaisant. Nous sommes en effet à deux doigts du film académique en costume, plombé par une séries de choix esthétiques semblant très 90s avec 30 ans d'écart (les ralentis, la musique synthétique surgissant sans cesse...). Ces considérations mise à part, l'ampleur portée par le film (les échanges entre les générations, les choix de vie, le rapport au passé et au futur) est bien mené et surtout le film à le grand mérite de m'avoir fait découvrir la culture Gullah et les "Sea Island" de Caroline du Sud dont je n'avais absolument jamais entendu parler.



Je me permet de signaler que j'ai découvert ce film par le classement Sight & Sound paru récemment.
Du coup je m'adresse à @groil_groil qui tapait sur Michel Ciment qui disait que si Akerman était première du classement ce n'était qu'un effet post-me too. Ciment le dit n'importe comment et avec une sale bêtise pleine de sous entendus, mais il n'a pas complètement tort. En effet S&S semble avoir laaaargement changé/ouvert son panel de votant pour son dernier vote, cherchant assurément à diversifier les points de vues et les opinions. C'est la seule explication possible pour un tel résultat obtenu : je doute que les votants d'il y a 10 ans ai soudainement décidé de porter la radicalité du cinéma Akermanien au nu et que Citizen Kane c'était un peu moins bien. Ce type de procédé me semble plus que souhaitable et aura permis de belles surprises, et de découvertes pour beaucoup, tout en servant sans doute aussi un certain agenda politique (le film ci-dessus est censé être le 30 ou 40ème meilleur film de tous les temps, et malgré ses qualités je me permettrais tout de même d'en douter...).
Avatar du membre
Tamponn Destartinn
Messages : 1123
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 21:11

Image

Documentaire aux hallucinantes images crues, après leur tout aussi hypnotisant Léviathan.
L'idée est de filmer au plus près le corps humain et sa santé.
Evidemment, les images chocs premières sont celles venant de caméras à l'intérieur du corps lors d'opérations chirurgicales, et c'est ce qui est le plus intéressant dans le film.
Je m'interroge un poil plus sur les scènes qui suivent de près des vieilles femmes séniles ou un monsieur malade mentalement, car tout aussi marquantes soient-elles, la question de consentement à immortaliser ses moments tragiques de leurs vies m'empêche de les apprécier entièrement. Et puis même, c'est voyeuriste...
En dehors de cela, le film est une priorité pour qui n'a pas la phobie de ce genre d'images
Avatar du membre
Tyra
Messages : 1362
Enregistré le : jeu. 16 juil. 2020 16:59

cyborg a écrit :
mar. 17 janv. 2023 18:33
(le film ci-dessus est censé être le 30 ou 40ème meilleur film de tous les temps, et malgré ses qualités je me permettrais tout de même d'en douter...).
:hello: L'image ne s'affiche pas pour moi, du coup je ne sais pas de quel film tu parles.
Avatar du membre
Narval
Messages : 312
Enregistré le : sam. 24 oct. 2020 01:34

groil_groil a écrit :
mar. 17 janv. 2023 09:43
Oui j'adore aussi, si tu aimes le Poirier tu aimeras celui-ci (j'en avais peur aussi ;) )
Perso, autant j'aime beaucoup le Poirier sauvage (ainsi que la plupart de ses films), autant le Sommeil d'hiver est ruiné pour moi par le personnage principal. J'ai trouvé ça mauvais, voire insupportable, notamment à cause des dialogues interminables et de la vision complètement ridicule du couple ainsi que du théâtre qui est dépeinte. Par ailleurs le salaud de personnage principal n'est jamais remis en question pendant l'intégralité du film malgré son comportement (remis en question par le cinéaste hein). Si on rajoute en plus à ça des sous-intrigues putassières avec un accident et des gamins qui n'aboutissent à rien, je trouve que c'est son moins inspiré et son plus boursouflé.

Mais bon c'est la tradition de palmer les moins films des grands cinéastes donc...
Modifié en dernier par Narval le mar. 17 janv. 2023 22:07, modifié 1 fois.
Avatar du membre
Narval
Messages : 312
Enregistré le : sam. 24 oct. 2020 01:34

Tyra a écrit :
mar. 17 janv. 2023 21:56
:hello: L'image ne s'affiche pas pour moi, du coup je ne sais pas de quel film tu parles.
Bizarre, j'arrive à voir celle de Cyborg mais certaines du dernier post de groil sont manquantes...
Avatar du membre
Kit
Messages : 6418
Enregistré le : dim. 6 sept. 2020 23:51
Localisation : où est né William Wyler

Tyra a écrit :
mar. 17 janv. 2023 21:56
cyborg a écrit :
mar. 17 janv. 2023 18:33
(le film ci-dessus est censé être le 30 ou 40ème meilleur film de tous les temps, et malgré ses qualités je me permettrais tout de même d'en douter...).
:hello: L'image ne s'affiche pas pour moi, du coup je ne sais pas de quel film tu parles.
idem pour moi (que ce soit avec Vivaldi ou Firefox)
Vosg'patt de cœur
Avatar du membre
Kit
Messages : 6418
Enregistré le : dim. 6 sept. 2020 23:51
Localisation : où est né William Wyler

Narval a écrit :
mar. 17 janv. 2023 22:06
Tyra a écrit :
mar. 17 janv. 2023 21:56
:hello: L'image ne s'affiche pas pour moi, du coup je ne sais pas de quel film tu parles.
mais certaines du dernier post de groil sont manquantes...
idem pour moi que ce soit avec Vivaldi ou Firefox

bizarre sur l'ordi du boulot avec Firefox je vois toutes les images
Modifié en dernier par Kit le mer. 18 janv. 2023 23:19, modifié 1 fois.
Vosg'patt de cœur
Avatar du membre
Kit
Messages : 6418
Enregistré le : dim. 6 sept. 2020 23:51
Localisation : où est né William Wyler

hommage à Gina Lollobrigida sur Arte à 13h35
La Belle des belles (La donna più bella del mondo) 1955 Robert Z. Leonard
Image
Vosg'patt de cœur
Avatar du membre
cyborg
Messages : 285
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:11

Je parlais du film Daughters of the dust de Julie Dash


Image
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

cyborg a écrit :
mar. 17 janv. 2023 18:33
C'est la seule explication possible pour un tel résultat obtenu : je doute que les votants d'il y a 10 ans ai soudainement décidé de porter la radicalité du cinéma Akermanien au nu et que Citizen Kane c'était un peu moins bien.
je parie qu'ils ne l'ont jamais vu le film d'Akerman. Ton explication est, bien évidement, le seul possible.
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

Image

Nos Soleils, Carla Simon


(C'est l'ours d'or 2022, sorti donc presque un an après son prix, et sous un autre titre que celui sous lequel il a été présenté, à savoir Alcarras.)

Le film est bon, et même assez parfait, mais un peu trop "comme il faut". Je chipote, mais disons que le réalisme fait un peu figure, ici, d'académisme. Pour aller vite, je n'aime pas du tout les scènes avec le grand-père qui cueille les fruits à l'ancienne dans son verger paisible avec ses gestes lents (j'ai envie de dire : mon oeil) ; ni celles où l'on m'explique que la famille est unie malgré les épreuves, que le moment passé ensemble est de qualité, ou que l'ambiance est bonne envers et contre tout (on dirait Klapisch). Toute la première partie est un peu trop posée (voire poseuse) et pas assez vivante pour que je la traverse avec mes propres perceptions. La réalisatrice me demande de comprendre son film, et non de le voir. Ce n'est pas le cas dans Y aura-t-il de la neige à Noël, Les Merveilles ni La Cienaga, qui sont certainement les grands modèles de Nos Soleils.
Et puis ça s'améliore. Peu à peu, le film se débarrasse de sa prudence, il se défait de sa première esthétique et tente d'élaborer des scènes plus narratives, qui sont tout de suite énigmatiques, incertaines et vibrantes. C'est bon signe pour cette réalisatrice, qui fera sûrement de belles choses par la suite. En attendant il y a ce Nos Soleils, un peu tiède au préalable mais finalement assez âpre, très touchant à force de creuser la piste d'une défaite à laquelle un homme ne se résout pas, pourtant inévitable, entraînant avec lui, vers la catastrophe évidente, toute sa famille, et notamment son pauvre fils qui lui est si fidèle, beau personnage transi de peur à l'idée de perdre l'amour de son père.
Avatar du membre
yhi
Messages : 367
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:48

asketoner a écrit :
ven. 20 janv. 2023 17:04
Le film est bon, et même assez parfait, mais un peu trop "comme il faut".
Tellement que je l'ai trouvé barbant.
C'est un film ou les jumeaux portent les mêmes vêtements, où les enfants montent une pièce de théâtre pour leurs parents, où les agriculteurs font grêve en laçant des fruits pourris. Il n'y a aucune altérité, j'ai eu l'impression de voir des successions de platitudes qui font du film une tautologie. Je ne veux pas enlever au film que c'est son évidence qui fait sa force, mais sur 2h c'était compliqué. C'é"tait déjà come ça dans son premier film, je crois, qui ne m'a laissé quasiment aucun souvenir.

Carla Simon a réalisé un court métrage (d'échanges épistolaires) avec Dominga Sotomayor avec qui elle doit être proche. Leurs cinémas se ressemblent et pourtant pas facile de déceler pourquoi ce qui ne fonctionne pas chez la première prend bien pour moi chez la seconde.
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

yhi a écrit :
ven. 20 janv. 2023 17:11
asketoner a écrit :
ven. 20 janv. 2023 17:04
Le film est bon, et même assez parfait, mais un peu trop "comme il faut".
Tellement que je l'ai trouvé barbant.
C'est un film ou les jumeaux portent les mêmes vêtements, où les enfants montent une pièce de théâtre pour leurs parents, où les agriculteurs font grêve en laçant des fruits pourris. Il n'y a aucune altérité, j'ai eu l'impression de voir des successions de platitudes qui font du film une tautologie. Je ne veux pas enlever au film que c'est son évidence qui fait sa force, mais sur 2h c'était compliqué. C'é"tait déjà come ça dans son premier film, je crois, qui ne m'a laissé quasiment aucun souvenir.

Carla Simon a réalisé un court métrage (d'échanges épistolaires) avec Dominga Sotomayor avec qui elle doit être proche. Leurs cinémas se ressemblent et pourtant pas facile de déceler pourquoi ce qui ne fonctionne pas chez la première prend bien pour moi chez la seconde.
Je ne connais pas du tout Sotomayor, mais je comprends que ce cinéma laisse froid. Ce n'est pas très intense en fait.
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

yhi a écrit :
ven. 20 janv. 2023 17:11


Tellement que je l'ai trouvé barbant.
C'est un film ou les jumeaux portent les mêmes vêtements, où les enfants montent une pièce de théâtre pour leurs parents, où les agriculteurs font grêve en laçant des fruits pourris.


Au cinéma, tu veux t’évader. Pas t’y immerger . Tout ça c’est banal (enfants, pièce de théâtre etc) pour toi. Je comprends mais qu’est ce que je ne suis pas d’accord !

Très beau film. Très démocratique. Même TRÈS TRÈS démocratique (exemple : quand la femme fout une baffe au fils de son beau frère, elle en foute une aussi à son mari). Rarement dans un film choral les personnages ont à une seconde près droit à l’image ou à la parole.

Chapeau !!
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
Tyra
Messages : 1362
Enregistré le : jeu. 16 juil. 2020 16:59

Sinon, personne pour servir de cobaye et se cogner les 3 heures de Babylon ? :D
Avatar du membre
Kit
Messages : 6418
Enregistré le : dim. 6 sept. 2020 23:51
Localisation : où est né William Wyler

Tyra a écrit :
ven. 20 janv. 2023 22:04
Sinon, personne pour servir de cobaye et se cogner les 3 heures de Babylon ? :D
NaughtyDog l'a aimé
Vosg'patt de cœur
Avatar du membre
yhi
Messages : 367
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:48

Tyra a écrit :
ven. 20 janv. 2023 22:04
Sinon, personne pour servir de cobaye et se cogner les 3 heures de Babylon ? :D
Vu cet après midi et j'ai pris une bonne claque.
Mais mes avis différent souvent de ceux des gens qui postent par ici, et je suis loin d'être sûr que tout le monde y trouve son compte.
C'est ambitieux et à mon opinion plutôt à la hauteur de ses ambitions. Après ça reste un gros morceau qui peut vite provoquer l'indigestion pour ceux qui 'y accroche pas (c'est assez hystérique, vulgaire et bruyant, mais c'est l'idée du film, Babylone)
Kahled
Messages : 506
Enregistré le : jeu. 16 juil. 2020 18:04

Vu cet après-midi aussi. J’ai également adoré mais pas sûr que ça emballe beaucoup de monde ici en effet. :saint: :D
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

Je vais sans doute y aller, j'ai détesté Lalaland mais la période décrite me passionne.

Image

Kino-Glaz, Dizga Vertov, 1924

Kino-Glaz, comme Genèse d'un repas de Luc Moullet, remonte à la source de ce que nous mangeons. Le procédé de Vertov est littéral : en faisant tourner la bobine dans le sens contraire de son enregistrement, il transforme le pain en pâte, la pâte en farine et la farine en épis de blés sous le soleil soviétique. Le procédé est non seulement amusant mais aussi didactique, et idéologique : c'est en remontant le cours du temps que l'on peut penser. Le geste cinématographique de Vertov est donc bel et bien celui de l'analyse. Il s'agit d'inverser l'ordre des choses, pour le renverser si besoin.
Après l'aventure des actualités de Kino-Pravda (que j'ai vues aussi, mais pas toutes), Dziga Vertov invente le documentaire. L'enthousiasme du film est flagrant. On suit ces jeunes pionniers, bien décidés à apporter quelque chose de neuf et de juste en ce monde. Staline ne tardera pas à mettre fin à cette joie sans doute un peu trop pure, qui irradie, en la qualifiant de formaliste. Pourtant je ne sais pas si on peut faire un film plus convaincu de la nécessité du communisme. Ni même un film plus joyeux, au fond, que celui-ci.
Mais un détail du réel saisit, lors d'une scène a priori anodine où les pionniers se jettent dans le lac. Tous vont se baigner sauf un, qui hésite, puis renonce carrément. La peur est toujours plus forte.
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

asketoner a écrit :
sam. 21 janv. 2023 21:19
Staline ne tardera pas à mettre fin à cette joie sans doute un peu trop pure, qui irradie, en la qualifiant de formaliste.
Tu parles en général ou particulièrement à propos de «Ciné-œil» (Kino-glaz) ?

Je ne crois pas que Staline (vers la fin des années 20 je parle) a voulu mettre fin à cette façon de faire de l’art en la trouvant ‘trop pure’ (car, il ne savait pas du tout comment les choses allaient continuer : c’est la première fois que la classe ouvrière prenait le pouvoir, au moins sur papier donc, tout était de la pure expérimentation). C’est avant tout parce qu’il voulait crée une méthode officielle de l’art, pour bien la distinguer de l’art des autres pays dit capitalistes. Il la appelait la méthode du réalisme socialiste.

Avec le recul (pour être franc, je connais assez bien l’histoire de l’URSS des années 20, le début du début quoi) je pense que, si on considère que ce que l’Union Soviétique a construit économiquement était un capitalisme d’état (puisque l’accumulation du capital restait tout de même le socle de toute activité économique), on peut déduire que la méthode du réalisme socialiste est à l’art capitaliste ce que le capitalisme d’état est au capitalisme (tout court). Car, mine de rien, la méthode du réalisme socialiste a ‘piqué’ à l’art capitaliste son socle : le réalisme.
Ce qui prouve que, in fine, on ne peut jamais parler d’art communiste (puisque le communisme est impossible d’exister comme système - la preuve : il s’agissait d’un capitalisme d’état) mais plutôt on peut parler de communisme des arts (ce que Vertov a tenté de faire) donc certainement pas comme une méthode systémique (puisque le communisme ne peut être un système mais un mouvement) mais comme un horizon. Un mouvement qui tente vers ce horizon.

ps: ce qui est intéressant c’est que le fameux Marx n’a quasiment jamais parlé du communisme : son « Capital » n’est qu’une critique du capitalisme lequel, toujours selon lui, contrairement aux autres systèmes (à l’esclavage, au féodalisme) se distingue par l’accumulation du capital (qui est à l’origine de tous les maux : l’aliénation par le travail, les inégalités, la crise écologique etc etc). Le capitalisme d’état (le bloc soviétique) a produit les mêmes conséquences (bureaucratie, Tchernobyl etc etc). Il était inévitable que l’art du réalisme socialiste soit également un échec.

ps2 : La preuve de ce que je dis est la facilité avec laquelle le capitalisme d’état des pays de l’Est a été transformé en capitalisme (tout court) à partir des années ‘90. Pourquoi ? Parce que c’était tout de même du capitalisme (accumulation du capital).
Il en est allé de même pour l’art du réalisme socialiste : « Quand passent les cigognes » n’a rien de communiste (c’est déjà du Hollywood dans toute sa splendeur) et pour Mikhalkov, faire des films dans une société capitaliste d’état ou capitaliste (tout court), à part la mode de production (publique ou privé, mais capitaliste tout de même), n’a jamais était une vrai différence. Par contre, après les années 20, on entend presque plus de Vertov. Hazard ? Pas du tout : la suite logique (hélas, bien sûr) de ce que je viens d’argumenter plus haut
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

sokol a écrit :
dim. 22 janv. 2023 16:00
asketoner a écrit :
sam. 21 janv. 2023 21:19
Staline ne tardera pas à mettre fin à cette joie sans doute un peu trop pure, qui irradie, en la qualifiant de formaliste.
Tu parles en général ou particulièrement à propos de «Ciné-œil» (Kino-glaz) ?

Je ne crois pas que Staline (vers la fin des années 20 je parle) a voulu mettre fin à cette façon de faire de l’art en la trouvant ‘trop pure’ (car, il ne savait pas du tout comment les choses allaient continuer : c’est la première fois que la classe ouvrière prenait le pouvoir, au moins sur papier donc, tout était de la pure expérimentation). C’est avant tout parce qu’il voulait crée une méthode officielle de l’art, pour bien la distinguer de l’art des autres pays dit capitalistes. Il la appelait la méthode du réalisme socialiste.

Avec le recul (pour être franc, je connais assez bien l’histoire de l’URSS des années 20, le début du début quoi) je pense que, si on considère que ce que l’Union Soviétique a construit économiquement était un capitalisme d’état (puisque l’accumulation du capital restait tout de même le socle de toute activité économique), on peut déduire que la méthode du réalisme socialiste est à l’art capitaliste ce que le capitalisme d’état est au capitalisme (tout court). Car, mine de rien, la méthode du réalisme socialiste a ‘piqué’ à l’art capitaliste son socle : le réalisme.
Ce qui prouve que, in fine, on ne peut jamais parler d’art communiste (puisque le communisme est impossible d’exister comme système - la preuve : il s’agissait d’un capitalisme d’état) mais plutôt on peut parler de communisme des arts (ce que Vertov a tenté de faire) donc certainement pas comme une méthode systémique (puisque le communisme ne peut être un système mais un mouvement) mais comme un horizon. Un mouvement qui tente vers ce horizon.

ps: ce qui est intéressant c’est que le fameux Marx n’a quasiment jamais parlé du communisme : son « Capital » n’est qu’une critique du capitalisme lequel, toujours selon lui, contrairement aux autres systèmes (à l’esclavage, au féodalisme) se distingue par l’accumulation du capital (qui est à l’origine de tous les maux : l’aliénation par le travail, les inégalités, la crise écologique etc etc). Le capitalisme d’état (le bloc soviétique) a produit les mêmes conséquences (bureaucratie, Tchernobyl etc etc). Il était inévitable que l’art du réalisme socialiste soit également un échec.

ps2 : La preuve de ce que je dis est la facilité avec laquelle le capitalisme d’état des pays de l’Est a été transformé en capitalisme (tout court) à partir des années ‘90. Pourquoi ? Parce que c’était tout de même du capitalisme (accumulation du capital).
Il en est allé de même pour l’art du réalisme socialiste : « Quand passent les cigognes » n’a rien de communiste (c’est déjà du Hollywood dans toute sa splendeur) et pour Mikhalkov, faire des films dans une société capitaliste d’état ou capitaliste (tout court), à part la mode de production (publique ou privé, mais capitaliste tout de même), n’a jamais était une vrai différence. Par contre, après les années 20, on entend presque plus de Vertov. Hazard ? Pas du tout : la suite logique (hélas, bien sûr) de ce que je viens d’argumenter plus haut
Oui, bien sûr, il ne s'attaque pas à la pureté en soi, mais à l'expérimentation formelle de Vertov (dans laquelle réside sa pureté, je crois, la pureté de son cinéma en tout cas : cette espèce de joie inaliénable), pour imposer le réalisme socialiste.
Donc je parlais en général, parce qu'effectivement, passé 1930, Vertov s'éclipse...
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

Image

Babylon, Damien Chazelle

Caca, vomi, sang, larme. Voilà pour le trajet spirituel du film. On est à peu près dans le même genre de vision du monde que sur le paquebot de Ruben Ostlund. Ces derniers temps, les cinéastes ont tendance à réduire leur discours à : merde alors. Chez Chazelle, c'est vraiment étonnant, on dirait que le film est atteint par le syndrome de la Tourette, tout ce qu'il pourrait montrer ou inventer ou dire est remplacé par de la merde.
Et on est bien aux Etats-Unis : c'est toujours à la fin qu'on pleure, jamais au début. (La Rivière Rouge de Howard Hawks est vraiment un film courageux, unique, avec sa scène finale de mélodrame placée en ouverture.) Mais j'exagère, la fin de Babylon sert aussi de leçon d'histoire. Soudain, l'un des protagonistes s'assoit dans une salle de cinéma et voit tout ce qui a été fait et tout ce qui le sera. Le montage entremêle des séquences de son propre film, la musique de Chantons sous la pluie, des cartons colorés et le visage d'Anna Karina assise au cinéma dans Vivre sa vie de Godard. Le visionnaire Chazelle en profite pour imaginer un art où les taches de couleur danseront sur une toile blanche. Sympa.
Mais je crois que le problème vient surtout du fait que Chazelle n'aime pas le cinéma. C'est-à-dire qu'il aime l'effet que ça lui procure peut-être, mais pas la pratique. Il semble tourner des scènes à contre-coeur. On ne voit presque rien alors que ça déborde de costumes et de personnages. La musique tente de faire tenir ensemble des séquences que le montage tresse n'importe comment. Il y a des idées sans plaisir, autrement dit : des solutions. Chazelle ne tourne pas un film, il le résout. Il ne veut pas donner à voir, il veut juste que ça passe. C'est peut-être le dernier film d'auteur de cette ampleur à Hollywood, et c'est un film qui se fuit lui-même, qui se sabote tout le temps, et se défile. Même une publicité est plus franche : au moins, elle montre le produit.

Image

Le Mur des morts, Eugène Green, 2021

Qu'est-ce qu'on fait avec des principes ?
Parfois un cinéma très ennuyeux, dévitalisé, étroit et théorique.
Parfois un cinéma à travers les structures duquel souffle un esprit qui emporte tout.
Le Mur des morts présente ces deux facettes. Il y a quelques moments de grâce qui surnagent dans pas mal de facilités. Je trouve assez belle l'idée de rejouer chaque rencontre deux fois. Mais ce que propose le film la deuxième fois n'est pas toujours grandiose.
Par ailleurs, une scène m'a vraiment fait tiquer, celle avec l'épicier. Le héros rencontre un clochard à qui il ne donne rien (la deuxième fois non plus). Puis il manque de se faire renverser par un cycliste qui l'insulte (là, il n'y aura pas de deuxième fois ; ça fait un peu HidagoSaccageParis mais passons). Enfin, il s'arrête face à l'épicier, arabe, posté devant sa boutique, les bras croisés, il ne trouve rien à lui dire et prend un air affligé. La deuxième fois, il lui dira bonjour, et l'épicier lui sourira en retour. Je ne sais pas ce que cette scène raconte réellement, mais elle est juste horrible. Elle n'est peut-être pas profondément raciste, mais elle sème un trouble et c'est presque pire. Ok, le cinéma est un art de droite, produit par des gens de droite et tout et tout, mais il y a des limites.
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

asketoner a écrit :
lun. 23 janv. 2023 01:27
Ces derniers temps, les cinéastes ont tendance à réduire leur discours à : merde alors. Chez Chazelle, c'est vraiment étonnant, on dirait que le film est atteint par le syndrome de la Tourette, tout ce qu'il pourrait montrer ou inventer ou dire est remplacé par de la merde.
C'est la faute à Pasolini (Salo quoi) ^^ :D

ps; au Goulag, au Goulag, au Goulag !
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

Image

Closed Curtain, Jafar Panahi & Kambuzia Partovi, 2013


Ce film de Panahi n'est pas sorti en France. C'est loin d'être son meilleur, c'est vrai, mais bon, quand même, Panahi n'est pas le moindre des cinéastes. Et même quand il se rate un peu, ça reste intéressant.
D'ailleurs au début c'est excellent, presque une science-fiction, avec un homme qui cache son chien et des gens qui surgissent au milieu de la nuit, et qui sont peut-être les personnages du scénario qu'il est en train d'écrire. Et puis, quand le vrai et le faux se croisent encore un peu plus, quand Panahi lui-même surgit et rencontre l'un des personnages inventé par l'homme au chien qui n'est peut-être lui-même qu'un personnage inventé par Panahi, ça ne produit pas le vertige attendu. Le sens se referme sur la question de l'autoportrait en artiste empêché, la mélancolie s'abouche mal à la dystopie, elle semble l'expliquer au lieu de l'ouvrir. C'était si beau de voir un homme arriver dans une maison et poser des rideaux noirs sur toutes les fenêtres.
Avatar du membre
Kit
Messages : 6418
Enregistré le : dim. 6 sept. 2020 23:51
Localisation : où est né William Wyler

@groil_groil
ce soir sur C8 vers 21h20 (si la bande d'abrutis ne monopolise pas plus l'antenne)
Image
:love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2: :love2:
Vosg'patt de cœur
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

merci !
I like your hair.
Avatar du membre
teklow13
Messages : 1404
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 19:14

Tyra a écrit :
ven. 20 janv. 2023 22:04
Sinon, personne pour servir de cobaye et se cogner les 3 heures de Babylon ? :D
pardon mais en quoi voir ce film c'est ce le "cogner" ?....
Avatar du membre
Tyra
Messages : 1362
Enregistré le : jeu. 16 juil. 2020 16:59

teklow13 a écrit :
ven. 27 janv. 2023 12:46
Tyra a écrit :
ven. 20 janv. 2023 22:04
Sinon, personne pour servir de cobaye et se cogner les 3 heures de Babylon ? :D
pardon mais en quoi voir ce film c'est ce le "cogner" ?....
La bande annonce me fait davantage penser à du Baz Luhrmann (une certaine idée de l'enfer) qu'à du Chazelle, dont j'avais aimé certains films jusque là.
Avatar du membre
Tyra
Messages : 1362
Enregistré le : jeu. 16 juil. 2020 16:59

Image

J'avais jamais vu. Un esprit antimilitariste et libertaire, qui s'exerce sur le dos de la hiérarchie militaire (bon, logique), mais aussi les blessés de guerre, et 80% du temps, sur les femmes, décrites comme des salopes et qui passent leur temps à se voir humiliées par les hommes du camp. Beurk.
Modifié en dernier par Tyra le ven. 27 janv. 2023 13:52, modifié 1 fois.
Avatar du membre
Mr-Orange
Messages : 599
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 20:33

Tyra a écrit :
ven. 27 janv. 2023 13:32
teklow13 a écrit :
ven. 27 janv. 2023 12:46
Tyra a écrit :
ven. 20 janv. 2023 22:04
Sinon, personne pour servir de cobaye et se cogner les 3 heures de Babylon ? :D
pardon mais en quoi voir ce film c'est ce le "cogner" ?....
La bande annonce me fait davantage penser à du Baz Luhrmann (une certaine idée de l'enfer) qu'à du Chazelle, dont j'avais aimé certains films jusque là.
Oui, moi aussi. J'ai bien voire beaucoup aimé les films de Chazelle jusqu'ici, mais j'ai là beaucoup de mal à me motiver, la bande-annonce est insupportable.
Avatar du membre
Tyra
Messages : 1362
Enregistré le : jeu. 16 juil. 2020 16:59

Mr-Orange a écrit :
ven. 27 janv. 2023 13:40
Tyra a écrit :
ven. 27 janv. 2023 13:32
teklow13 a écrit :
ven. 27 janv. 2023 12:46


pardon mais en quoi voir ce film c'est ce le "cogner" ?....
La bande annonce me fait davantage penser à du Baz Luhrmann (une certaine idée de l'enfer) qu'à du Chazelle, dont j'avais aimé certains films jusque là.
Oui, moi aussi. J'ai bien voire beaucoup aimé les films de Chazelle jusqu'ici, mais j'ai là beaucoup de mal à me motiver, la bande-annonce est insupportable.
J'ajoute à cela un ras-le-bol de ces films pseudo-cools (auquel d'ailleurs Pitt et Robie sont habitués) contents de soi, constamment ironiques ou cyniques, de plus en plus fréquents dans le cinéma américain.
len'
Messages : 70
Enregistré le : lun. 19 juil. 2021 13:22

Babylon de Damien Chazelle

Quand un brillant élève se met à dessiner des bites sur le tableau de classe, ça donne quoi ? Et quand ce tableau coûte plusieurs dizaines de millions de dollars ? C'est pas que ça me déplaît sur le principe, surtout quand ça consiste à faire un doigt d'honneur à un cinéma hollywoodien emballé sous cellophane. Il y a juste un souci qui se voit dès la première chiasse d'éléphant : Chazelle n'est pas fait pour ça. Digne héritier d'un cinéma américain mêlant narration linéaire et équilibrée, prouesses techniques et acteurs charismatiques, c'est plutôt déroutant de le voir réaliser ce film, comme si Spielberg, au lieu de réaliser un remake de west side story, se disait : tiens, pourquoi je referais pas la grande bouffe à ma sauce et en plus trash. Il y a toujours la technique, les acteurs, la narration rythmée, mais il manque cette alchimie qui faisait la force d'un la la land, sorte de petit miracle dans un cinéma hollywoodien constipé. En dénonçant cet état actuel d'Hollywood, Chazelle se retrouve paradoxalement lui-même pris au piège à vouloir réaliser quelque chose de trop grand, au sens strict. Donc ça en fait beaucoup, ça gueule, ça vomit et ça finit sur ce qu'on connaît déjà, c'est à dire des images de cinéma qu'on pourrait trouver dans un album photo factice vendu au supermarché du coin avec en gros écrit "un siècle de cinéma" dessus. Comme accompagnement, la musique de Justin Hurwitz semble elle-même un remaché de celle de la la land, pas dégueulasse mais sans la magie des premiers instants.
Pourtant, j'y repense beaucoup à ce film. D'abord parce que je trouve que c'est un des meilleurs rôles de Brad Pitt, dans le prolongement de ses personnages chez Gray et Tarantino - autant Chazelle j'ai des doutes, mais pour Pitt c'est bien un rôle qui lui va bien. Margot Robbie, qui incarne une chimère, rappelle les stars de l'âge d'or d'Hollywood dans sa façon d'hypnotiser la caméra (qu'elle soit vulgaire ou non n'y change rien). Ce sont des rôles symboliques, des stars qui jouent des stars, inaccessibles au commun des mortels et inaccessibles à eux-mêmes. Il y a cette douleur omniprésente de vouloir  accéder à quelque chose de plus grand que soi, comme si soi n'était qu'une coquille ne demandant qu'à être remplie constamment. Mais par quoi ? La célébrité ? La participation à quelque chose qui restera ? L'amour ? C'est la seule chose qui relie le personnage inconnu joué par Diego Calva aux stars, cette quête désespérée.
Mais surtout, j'ai comme l'impression de faire une énième expérience sociologique plus que cinématographique. Après les hystériques loup de wall street et once upon a time in hollywood, les dépressifs ad astra et matrix resurrections, les nostalgiques ready player one et under the silver lake (qui se regardaient déjà dans les fondements), voici donc Babylon qui mélange tout ça et donne le coup de grâce à un cinéma américain qu'on peut qualifier d'"auteur à gros budget". À noter que Chazelle finit sa rétrospective sur des images d'Avatar premier du nom (à confirmer), et donc en 2009, et donc ça veut dire quoi ? Le cinéma est mort en 2009 ? C'est aussi à ce moment-là qu'il a commencé à réaliser et que tous les films précités sont sortis. Peut-être bien un film suicide donc, comme s'il fallait ça, pour tuer d'emblée ce qu'il aurait pu devenir, ou plutôt ce qu'on souhaitait qu'il devienne. Donc nouveau départ ou fin en grandes lettres ?
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

len' a écrit :
ven. 27 janv. 2023 17:36
Babylon de Damien Chazelle
Objection : et le petit cinéma (le «montage-mon-beau-souci ») alias le ‘micro-cinéma’ (ce qui correspondrait en économie à la microéconomie), se porte comment dans ce film ?
Merci
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
len'
Messages : 70
Enregistré le : lun. 19 juil. 2021 13:22

sokol a écrit :
sam. 28 janv. 2023 12:23
len' a écrit :
ven. 27 janv. 2023 17:36
Babylon de Damien Chazelle
Objection : et le petit cinéma (le «montage-mon-beau-souci ») alias le ‘micro-cinéma’ (ce qui correspondrait en économie à la microéconomie), se porte comment dans ce film ?
Merci
Ça passait bien pour whiplash et la la land, mais là c'est peut-être trop long (ou pas assez), du coup c'est comme l'économie : ça vacille et il y a des bulles.
Je me suis dit qu'il aurait dû prendre la monteuse de Scorsese, mais il manque la voix off.

Après, c'est pas ce que j'ai vu de pire, surtout ces dernières années et surtout dans le cinéma américain. Mais faut pas s'attendre à du montage dans l'esprit Godardien, même s'il le cite à la fin (d'ailleurs pourquoi les cinéastes comme Scorsese, Tarantino et Chazelle citent toujours Godard ? Ça m'échappe, c'est pas du tout leur cinéma).
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

len' a écrit :
lun. 30 janv. 2023 12:18
(d'ailleurs pourquoi les cinéastes comme Scorsese, Tarantino et Chazelle citent toujours Godard ? Ça m'échappe, c'est pas du tout leur cinéma
En fait, si. Et j'ia mis du temps à comprendre ça.
Ils voudraient bien faire du Godard, mais ils n'y arrivent pas. C'est un peu comme ceux qui aiment faire du Tarkovski du Bresson ou du Pasolini, surtout celui de Salo (il y en a plein en ce moment !). C'est pour cela que je dis assez souvent, ironiquement : c'est la faute à Tarko ! (ou à Pasolini).

Tout ce qui est cinéma clipesque (surtout post '80) vient du Godard, c'est une évidence. Exemple : quand tu vois les ralenties du "Sauve qui peut la vie", tu te dis : et pourquoi pas les autres ?? Donc, c'est la faute à Godard !

Un autre exemple : dans une des éditions de "Salo" de Pasolini, dans le supplément, des cinéastes comme Catherine Breillat ou Claire Denis etc parlent de ce film. il y a une interview avec Gaspar Noé. il faut l'écouter car c'est ahurissant : il n'a rien compris du film. Ou plus exactement, il a compris tout le contraire. résultat : il a pondu "Irréversible" !
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

Image

Argento revient au giallo après un virage abstrait, et le résultat est la somme de tout ça : un giallo abstrait, dont l'intrigue est aussi tarabiscotée que foireuse, mais dont les audaces visuelles sont saisissantes. Et l'une des plus belles BO de Goblin.

Image

Deux célibataires d'âge mur (enfin pour l'époque) vivent une idylle lors de vacances en bord de mer. Associant deux stars de l'époque, le film n'est pas pour autant une comédie balisée, mais un film d'auteur fragile qui fait à chaque fois un pas de côté vers un cinéma plus personnel. Une joli curiosité.

Image

Le film est plus connu sous le nom de "Faire Face".
La carrière d'un couple de danseurs est brisée lorsque la jeune femme attrape la polio. Ida Lupino, grande cinéaste, suit avec beaucoup de réalisme la descente aux enfers puis la reconstruction de cette femme.

Image

J'avais été déçu la première fois, mais je le réhabilite, c'est encore un film habité, encore l'un des ceux, le dernier ?, où Argento ne se soucie vraiment que de mise en scène.

Image

Rerere, puisque second visionnage en quelques jours, c'est sans doute le film le plus giallo d'Argento, celui où il joue le plus le jeu du premier degré du second degré.

Image

André Sauvage accompagne et filme la grande expédition Citroën à travers l'Asie. Je suis un fan inconditionnel de son film Etudes sur Paris, mais alors que l'aventure extrême de la Croisière Jaune est vraiment propice à s'associer à son talent, je suis déçu par celui-là. On sent la main de Citroën pour transformer le film en une longue publicité vantant les mérites de sa marque et c'est gênant. Il y a des paysages magnifiques, mais le souffle de l'aventure est absent.

Image

Deuxième Hitchcock montré à mon gamin, on va vite passer aux choses sérieuses.

Image

Nul, mais lo-fi, ce qui lui donne presque un petit côté sympatique.

Image

C'est exactement, mais vraiment exactement, le même film qu'El Mariachi, mais avec plus de moyens, ce qui le rend tout de suite insupportable.

Image

Chaussons pépères et confortables.

Image

Drame tragique et bouleversant autour de la question de la maternité. Ida Lupino fut décidemment une extraordinaire cinéaste (en plus d'être l'une des plus grandes actrices d'Hollywood).

Image

Cet énième visionnage confirme malheureusement que c'est l'un des Argento grande période que j'aime le moins. Il pourrait être le premier volet d'une trilogie abstraite, complétée par Inferno puis Phenomena, mais je trouve ces deux derniers tellement au-dessus.

Image

ça se joue à pas grand chose, et je crois que j'aurais pu basculer de l'autre côté, mais au final j'aime beaucoup le film. Il y a une tension permanente qui n'est pas due qu'au scénario et qui est générée par la mise en scène qui me plait beaucoup, et surtout le film ne tombe pas dans le piège que je redoutais façon vengeance porn à la Chiens de Paille que je redoutais tant. Même la fin, je l'aime, je pense même que c'est ce que je préfère. Déjà parce que ce n'est pas un film de vengeance, de loi du talion, mais ce sont la police et la justice qui jugent, et ensuite parce qu'on croit à un moment que l'image va apporter la preuve, mais elle se révèle muette, incapable de dire quoi que ce soit, et je vois ça comme l'humilité du travail du cinéaste qui n'est pas là pour dire qui est coupable ou non.

Image

Spaghetti flamboyant et gargantuesque, bien que totalement secondaire (comme la quasi totalité des oeuvres du genre d'ailleurs).

Image

Un film pareil, c'est forcément délicat, et le jugement qu'on lui porte aussi. Disons que Winocour choisit de fictionnaliser les attentats, pour parler de comment on s'en sort, comment on réapprend à vivre avec et comme Lanzmann le dit à propos de la Shoah, j'aurais tendance à dire que la fiction est interdite dans ces cas-là. Elle y greffe un roulage de pelle sous les coups de kalashnikov ou une histoire de cuistot sans papier qui lui prend la main, et qu'elle va tenter de retrouver. Est-ce qu'on peut se permettre cela ? Mais j'ai appris que le frère de Winocour était au Bataclan, et je pense quequelque part ça lui donne le droit de faire ce film. Mais l'ensemble est suspicieux, on a du coup envie de savoir si ce qu'elle dit est vrai ou pas, de savoir si elle a le droit de le raconter ou pas. Pourtant je n'aime pas quand un film annonce "d'après une histoire vraie", mais disons que les Attentats de 2015 ce n'est pas un fait divers, c'est une tragédie collective, et qu'on ne peut pas s'en emparer pour en faire une fiction. Voilà, donc le film oscille en permanence dans cette incertitude, et qu'il propose parfois des moments très émouvants et d'autres plus gênants...
I like your hair.
Avatar du membre
asketoner
Messages : 1616
Enregistré le : ven. 9 oct. 2020 10:28

Image

Inland Sea, Kazuhiro Soda, 2018

En tout point semblable à Professeur Yamamoto prend sa retraite : un cinéma "d'observation", qui ne s'arrête pas à la surface de ce qui vit, mais s'arme de temps, de curiosité et d'un étonnement toujours vif, pour entrer dans la profondeur du vivant. Les gens sont très beaux chez Kazuhiro Soda. Ils sont très beaux même sans ses films, mais Kazuhiro Soda n'en doute jamais. Et il nous les révèle, les plus fragiles, les plus vieux, les plus instables, à force de passer du temps avec eux, de les suivre le long des chemins, de guetter leur arrivée à l'aube près du port. Les gens, les lieux, les rues, les chats errants : cette merveille d'être au monde, avec et malgré la douleur.
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

Image

En filmant la montée du racisme et de la ségrégation dans un petit village de Transylvanie, où les habitants sont déjà perdus entre plusieurs langues, Cristian Mungiu, dont la flamboyance du talent n'en finit pas de me bouleverser, s'affirmant aujourd'hui comme le croisement exact entre Nuri Bilge Ceylan et Andrei Zviaguintsev, mais en proposant un cinéma plus modeste que l'un et l'autre, offre une parabole de l'Europe absolument édifiante, et plus encore traite de la question de la mondialisation comme l'un des maux principaux de notre monde, mais sans jamais émettre le moindre discours réactionnaire. Au contraire, il se contente de faire le constat, aussi triste qu'amer, que tous les hommes et toutes les femmes qui peuplent ce monde ne sont pas tous les mêmes et qu'il y a parfois des différences qu'il faut respecter, des façons de vivre qui ne sont pas les mêmes. Je le disais, aucun protectionnisme, encore moins de nationalisme chez Mungiu, c'est au contraire un humaniste pessimiste, qui tend à dire ici que moins on connait l'étranger, plus on a peur de lui. Mais RMN n'est pas que ça, il offre aussi une radiographie du couple, de la solitude, du rapport au père / et au fils, de l'éducation, qui sont tout aussi bouleversants. Un des plus grands films de l'an dernier, qui va s'empresser de bouleverser mon top 10.
I like your hair.
Avatar du membre
teklow13
Messages : 1404
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 19:14

Après, c'est pas ce que j'ai vu de pire, surtout ces dernières années et surtout dans le cinéma américain. Mais faut pas s'attendre à du montage dans l'esprit Godardien, même s'il le cite à la fin (d'ailleurs pourquoi les cinéastes comme Scorsese, Tarantino et Chazelle citent toujours Godard ? Ça m'échappe, c'est pas du tout leur cinéma).
Désolé mais quel rapport avec Godard et le fait de le citer ?
La fin est un maelstrom d'images de l'histoire du cinéma, il y a aussi Avatar par exemple pourtant rien à voir avec la choucroute.
Et en quoi le fait d'aimer un cinéaste et de le dire obligerait à faire le même type de cinéma que lui ? je pige pas trop
On parle de cinéastes cinéphiles, ils aiment Godard autant que Ford ou Hawks ou autre
Si on parle de ce principe être cinéphile pour toi c'est être "OU" et non "ET". Il est interdit d'aimer Godard ou Corbucci ou Yves Robert ?
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

teklow13 a écrit :
mar. 31 janv. 2023 12:06

Désolé mais quel rapport avec Godard et le fait de le citer ?
Tu m'excuses mais il y a citer et citer. Chazelle & co., rien que le fait de faire un film dont ils sont scénaristes eux-mêmes, citent déjà Godard (ils se prennent pour lui). Ne t’inquiètes pas, Godard n'a pas le monopole du réalisateur-scénariste mais un peu quand même (si on revisite un peu l'histoire du cinéma).

Donc, le problème ne vient pas seulement de la citation de "Vivre sa vie" à la fin du "Babylon" mais de l'esprit du film : Chazelle rêverait qu'on le traite d'héritier de Godard (ou je ne sais qui d'autres cinéastes) n'est ce pas ? Ce qu'ils ne veulent pas comprendre c'est qu'on ne peut avoir et le beurre (un film à 80 millions), et la reconnaissance cinéphilique, et le succès financier, et... et... et... . Mais une fois de plus, "c'est la faute à Godard" donc c'est la faute au cinéma (d'ailleurs on dit souvent que Godard lui-même est le cinéma, n'est ce pas ?!) qui, étant un art impure, permet ce genre d'appropriation : comme rarement dans un art, on fait ce qu'on veut avec l'héritage cinématographique : tu crois que Godard a lâché inconsciemment son "C'est comme on disait au 17e siècle, Tarantino est un faquin, un pauvre garçon mais tant mieux s'il est heureux").

Donc, Chazelle est un homme heureux ? (il se prend pour je ne sais qui) ? Tant mieux pour lui !
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

sokol a écrit :
mar. 31 janv. 2023 15:46
teklow13 a écrit :
mar. 31 janv. 2023 12:06

Désolé mais quel rapport avec Godard et le fait de le citer ?
Tu m'excuses mais il y a citer et citer. Chazelle & co., rien que le fait de faire un film dont ils sont scénaristes eux-mêmes, citent déjà Godard (ils se prennent pour lui). Ne t’inquiètes pas, Godard n'a pas le monopole du réalisateur-scénariste mais un peu quand même (si on revisite un peu l'histoire du cinéma).

Donc, le problème ne vient pas seulement de la citation de "Vivre sa vie" à la fin du "Babylon" mais de l'esprit du film : Chazelle rêverait qu'on le traite d'héritier de Godard (ou je ne sais qui d'autres cinéastes) n'est ce pas ? Ce qu'ils ne veulent pas comprendre c'est qu'on ne peut avoir et le beurre (un film à 80 millions), et la reconnaissance cinéphilique, et le succès financier, et... et... et... . Mais une fois de plus, "c'est la faute à Godard" donc c'est la faute au cinéma (d'ailleurs on dit souvent que Godard lui-même est le cinéma, n'est ce pas ?!) qui, étant un art impure, permet ce genre d'appropriation : comme rarement dans un art, on fait ce qu'on veut avec l'héritage cinématographique : tu crois que Godard a lâché inconsciemment son "C'est comme on disait au 17e siècle, Tarantino est un faquin, un pauvre garçon mais tant mieux s'il est heureux").

Donc, Chazelle est un homme heureux ? (il se prend pour je ne sais qui) ? Tant mieux pour lui !
je vois le Chazelle ce soir, j'ai hâte :D
I like your hair.
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

groil_groil a écrit :
mar. 31 janv. 2023 09:28
Cristian Mungiu, dont la flamboyance du talent n'en finit pas de me bouleverser, s'affirmant aujourd'hui comme le croisement exact entre Nuri Bilge Ceylan et Andrei Zviaguintsev
Hmmm, oui, la Roumanie se trouve entre la Turquie et la Russie, géographiquement parlant, ce n'est pas faux (d'ailleurs, elle a fait partie et de l'Empire Ottoman et de l'Empire Soviétique).
Mais cinématographiquement parlant, pour moi, Mungiu se situent entre ce qu'il y a de plus passionnant, rigoureux et honnête dans le cinéma européen d'auteur (Guiraudie, Rabah Ameur-Zaïmeche, Maren Ade, Miguel Gomes,.. ) et ce qu'il y a de plus pas-passionnant, pas-rigoureux et pas-honnête dans le cinéma européen d'auteur (pawel Pawlikowski, François Ozon, Fatih Akin, Ruben Ostlund, Paolo Sorrentino ou Yorgos Lanthimos).
Entre les deux quoi
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
sokol
Messages : 1513
Enregistré le : lun. 12 oct. 2020 11:54

groil_groil a écrit :
mar. 31 janv. 2023 16:08
je vois le Chazelle ce soir, j'ai hâte :D
Je parie que tu vas... je ne sais pas :D
"Le cinéma n'existe pas en soi, il n'est pas un langage. Il est un instrument d’analyse et c'est tout. Il ne doit pas devenir une fin en soi".
Jean-Marie Straub
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

sokol a écrit :
mar. 31 janv. 2023 16:12
groil_groil a écrit :
mar. 31 janv. 2023 09:28
Cristian Mungiu, dont la flamboyance du talent n'en finit pas de me bouleverser, s'affirmant aujourd'hui comme le croisement exact entre Nuri Bilge Ceylan et Andrei Zviaguintsev
Hmmm, oui, la Roumanie se trouve entre la Turquie et la Russie, géographiquement parlant, ce n'est pas faux (d'ailleurs, elle a fait partie et de l'Empire Ottoman et de l'Empire Soviétique).
Mais cinématographiquement parlant, pour moi, Mungiu se situent entre ce qu'il y a de plus passionnant, rigoureux et honnête dans le cinéma européen d'auteur (Guiraudie, Rabah Ameur-Zaïmeche, Maren Ade, Miguel Gomes,.. ) et ce qu'il y a de plus pas-passionnant, pas-rigoureux et pas-honnête dans le cinéma européen d'auteur (pawel Pawlikowski, François Ozon, Fatih Akin, Ruben Ostlund, Paolo Sorrentino ou Yorgos Lanthimos).
Entre les deux quoi
je vois ce que tu veux dire mais franchement plus il avance plus il me passionne.
Et Ceylan et Zviguintsev sont des gars impressionnants mais envers qui j'avais des réserves, mais ces réserves se sont enlevées lorsque j'ai revu plusieurs films d'eux récemment. Ils sont juste parmi les plus forts, c'est tout.
I like your hair.
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

Image

Alors oui, c'est trop tout, trop long, trop boursouflé, trop hystérique, trop peu historique, mais j'ai adoré tout de même cette énergie permanente, cette générosité dans le geste et cette ambition délirante. L'époque est timide, réservée, prude, et qu'un cinéaste ose ça en ce moment, franchement, ça fait du bien. Il parvient à ne pas tomber dans le piège Baz Luhrmann alors qu'il rôde en permanence, il se situe un peu trop près de Tarantino (même si Once Upon A Time in Hollywood est dans le genre beaucoup plus réussi) et il ne peut pas s'empêcher - c'est sa moitié française expatriée à Hollywood - de dire haut et fort qu'il aime le cinéma européen, en citant Bergman ou Godard dans une séquence finale vraiment too much (il aurait pu s'arrêter à la projection de Chantons sous la Pluie c'était parfait). Car c'est de cela qu'il s'agit, Babylon est vraiment un remake de Chantons sous la Pluie, une relecture sous cocaïne, bigger than life, qui peut agacer ou fatiguer, je le comprends aisément, mais dont l'ambition et l'audace sont telles que j'ai vraiment envie de le défendre.

Image

De George Miller je n'aime que Les Sorcières d'Eastwick. Mais je l'adore vraiment. Le reste, rien à battre, surtout son dernier Mad Max encensé partout et que je trouve aussi moche que ridicule. Je ne sais donc pas ce qui m'a poussé à vouloir voir son dernier film, je n'en avais aucune envie et il y avait sur le papier tout ce que je déteste : une histoire de djinn, de bon génie qui exauce trois voeux et d'effets spéciaux aux couleurs dégueu... La surprise n'en fut que plus bonne car j'ai en effet été très sensible à la simplicité apparente de la narration et la fluidité de sa mise en scène. Une femme seule en déplacement à Istambul fait apparaitre un djinn d'une vieille fiole, ils sont dans sa chambre d'hôtel, et ils ne vont quasiment pas la quitter du film (seule la fin se déroule ailleurs et plus tard) et le djinn, avant d'exaucer ses voeux, va lui raconter son histoire, ses anciens "propriétaires", et comment il a influer leurs destins "à travers les âges". Et quand ce sera au tour de Tilda (elle tient excellement bien ce rôle !) son premier souhait remettra tout en cause et sera le plus beau qu'on puisse rêver. Là aussi sur pitch ça donne moyen envie, mais j'aime la façon dont Miller ne se met pas à hauteur de djinn mais à hauteur d'être humain pour dérouler ce conte, sans jamais en oublier sa magie non plus. Je trouve pas mal de points communs entre ce film et le Life of Pi d'Ang Lee, car dans les deux cas il s'agit d'utiliser le conte comme parabole du monde moderne, et de se servir des effets modernes qu'offre le cinéma à des fins les plus simples possibles. J'aime cette modestie du geste.
I like your hair.
len'
Messages : 70
Enregistré le : lun. 19 juil. 2021 13:22

teklow13 a écrit :
mar. 31 janv. 2023 12:06

Désolé mais quel rapport avec Godard et le fait de le citer ?
La fin est un maelstrom d'images de l'histoire du cinéma, il y a aussi Avatar par exemple pourtant rien à voir avec la choucroute.
Et en quoi le fait d'aimer un cinéaste et de le dire obligerait à faire le même type de cinéma que lui ? je pige pas trop
On parle de cinéastes cinéphiles, ils aiment Godard autant que Ford ou Hawks ou autre
Si on parle de ce principe être cinéphile pour toi c'est être "OU" et non "ET". Il est interdit d'aimer Godard ou Corbucci ou Yves Robert ?
S'il aime Godard, pourquoi il l'intègre dans un compromis de cinéma où tout est placé pour satisfaire tout le monde ? Je ne suis pas le plus grand connaisseur, ni le plus grand passionné des films de Godard, mais là ça me paraît gros. C'est complètement en contradiction avec l'esprit Godard qui tend à réinventer sans cesse le cinéma et pas simplement un cinéma. Si Chazelle l'aime vraiment, comment il peut faire abstraction de ça et le figer de cette façon ? Ça part certainement d'une bonne intention, mais ça devient en réalité une insulte dans ce cas précis. Je suis également d'accord avec Sokol (sauf sur "Chazelle qui se rêverait en digne héritier de Godard", j'irai pas jusque-là), j'ai la sensation qu'il y a parfois la volonté de "faire un peu comme". Mais non, ça ne va pas du tout dans le cas de Godard ou alors c'est juste une interprétation superficielle, faut repartir de l'esprit et pas se contenter de la déco (pour la référence à d'autres cinéastes, c'est déjà moins un problème (quoique ça dépend, c'est vrai qu'il y a aussi le cas Pasolini avec "Salo", mais c'est encore une autre histoire)). J'aime bien ces réalisateurs et il y a des choses que j'aime bien dans "Babylon", mais je trouve que ça les dessert plutôt qu'autre chose de faire appel à Godard d'une façon ou d'une autre. Ils perdront toujours au change.
Avatar du membre
groil_groil
Messages : 3778
Enregistré le : jeu. 8 oct. 2020 21:12

len' a écrit :
mer. 1 févr. 2023 12:27
teklow13 a écrit :
mar. 31 janv. 2023 12:06

Désolé mais quel rapport avec Godard et le fait de le citer ?
La fin est un maelstrom d'images de l'histoire du cinéma, il y a aussi Avatar par exemple pourtant rien à voir avec la choucroute.
Et en quoi le fait d'aimer un cinéaste et de le dire obligerait à faire le même type de cinéma que lui ? je pige pas trop
On parle de cinéastes cinéphiles, ils aiment Godard autant que Ford ou Hawks ou autre
Si on parle de ce principe être cinéphile pour toi c'est être "OU" et non "ET". Il est interdit d'aimer Godard ou Corbucci ou Yves Robert ?
S'il aime Godard, pourquoi il l'intègre dans un compromis de cinéma où tout est placé pour satisfaire tout le monde ? Je ne suis pas le plus grand connaisseur, ni le plus grand passionné des films de Godard, mais là ça me paraît gros. C'est complètement en contradiction avec l'esprit Godard qui tend à réinventer sans cesse le cinéma et pas simplement un cinéma. Si Chazelle l'aime vraiment, comment il peut faire abstraction de ça et le figer de cette façon ? Ça part certainement d'une bonne intention, mais ça devient en réalité une insulte dans ce cas précis. Je suis également d'accord avec Sokol (sauf sur "Chazelle qui se rêverait en digne héritier de Godard", j'irai pas jusque-là), j'ai la sensation qu'il y a parfois la volonté de "faire un peu comme". Mais non, ça ne va pas du tout dans le cas de Godard ou alors c'est juste une interprétation superficielle, faut repartir de l'esprit et pas se contenter de la déco (pour la référence à d'autres cinéastes, c'est déjà moins un problème (quoique ça dépend, c'est vrai qu'il y a aussi le cas Pasolini avec "Salo", mais c'est encore une autre histoire)). J'aime bien ces réalisateurs et il y a des choses que j'aime bien dans "Babylon", mais je trouve que ça les dessert plutôt qu'autre chose de faire appel à Godard d'une façon ou d'une autre. Ils perdront toujours au change.
Pour moi ce point est uniquement lié aux origines françaises du cinéaste. il est à Hollywood, et il veut dire aux américains qu'il n'est pas comme les autres cinéastes, qu'il est plus cultivé de par ses origines et il cite bêtement, en pur name dropping, Godard ou Bergman pour montrer qu'il est différent. C'est prétentieux et même péteux vu de chez nous, le film n'a absolument pas besoin de ça, mais je sens que si Chazelle place ça c'est que lui en a besoin. Un peu comme quand il fait mal danser ses danseurs de Lalaland pour que sa comédie musicale ressemble plus à celles de Demy qu'à celles d'Hollywood - et même si elle est hollywoodienne. C'est ridicule vu de chez nous, mais je pense que c'est perçu différemment là bas et qu'en tout cas c'est une nécessité pour lui.
I like your hair.
Répondre